DES LIVRES ET DES LIKES

Aujourd'hui, rares sont les acteurs du livre (éditeurs, libraires, bibliothécaires) qui ne sont pas sur les réseaux sociaux. Et pour cause : la communauté de lecteurs qui s'y est construite au fil des années a permis le développement d'un tout autre mode de circulation sociale du littéraire. C'est à la manière dont ces sociabilités sont affichées, revendiquées et encouragées par les plateformes numériques, notamment sur Youtube et Instagram, que Marine Siguier a consacré sa thèse, dans une versionici remaniée pour un public plus large. S'appuyant sur des concepts issus de la sémiologie, de l'histoire littéraire, et des sciences de l'information et de la communication, elle éclaire la représentation de soi en tant que lecteur, mais aussi du livre en tant qu'objet concret, matériel, qui s'élaborent sur ces réseaux sociaux. On découvre ainsi que, dans les espaces généralistes de Youtube et Instagram, qui ne sont pas dédiés au livre, les lecteurs ne cherchent pas à affirmer leur différence, mais plutôt à se fondre dans les logiques de chaque réseau, en épousant les codes et les formats populaires en ligne. " Challenges " de lectures, jeux et défis se succèdent pour tisser une communauté autour d'une identité commune. Sous l'influence des environnements numériques ultra-standardisés de ces réseaux, le livre regagne également toute sa matérialité, en devenant un objet ornemental, star des mises en scène de photos et vidéos, mais aussi un objet de plaisir, s'associant à l'humour, au jeu, et à l'érotisme.